Winter is going

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C’est la fin de l’hiver, ça ne veut pas dire que l’hiver est fini. Si les arbres bourgeonnent et si les première fleurs apparaissent en plaine, les sommets des montagnes que l’on aperçoit par temps clair s’accrochent encore solidement à leurs parures blanches.

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Je file droit dessus, il me reste deux mois dans le pays, pas assez pour ces considérations climatiques accessoires. Je franchis une dernière fois les Aples néo-zélandaises par le col d’Arthur pass. Les chutes de neiges m’évitent de justesse sur la route et la balade vers « Avalanche pic » s’effectue sous un ciel bleu immaculé, les pieds dans un bon mètre de neige. Les nuits sous tente sont un peu fraîches, -5° est une température où il est satisfaisant de garder ses chaussettes en toutes circonstances.

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Sur la route qui me ramène vers l’île du nord le parc national d’Abdel Tasman et ses très belles plages habituellement saturées de touriste est désert. C’est ici que je vois mes derniers wekas. Les wekas sont des sacrés farceurs. D’apparence très inoffensive, cet oiseau qui ne vole presque pas, un peu plus petit qu’une poule a failli chiper la place du kiwi en tant qu’emblème national. Et cela n’aurait pas été, loin s’en faut, l’unique larcin du piaf. Pas timide pour un sou, et bien que très rigolo, le weka peut s’avérer être un enquiquineur de première catégorie pour les campeurs. Le moindre objet laissé sans surveillance une poignée de seconde sera immédiatement subtilisé sans vergogne par le weka le plus proche. La nourriture, bien sûr les intéresse, mais pas seulement, couverts, vêtements, piquets de tente, lampe de poche ou même passeport sont tout autant sujets à ces exactions aviaires.

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L’île du nord que j’avais traversée la tête dans le guidon en arrivant dans le pays a encore de trop nombreux lieux à explorer. C’est notamment l’île des volcans. Le volcan Taranaki trône au milieu d’une large plaine agricole. Seul relief dans un rayon de 100km, la silhouette imposante de ce cône parfait de 2500m est visible à des centaines de km de distance quand le temps le permet. Lieu sacré pour les Maoris, le volcan est aujourd’hui considéré juridiquement comme une personne morale. Cela permet à Taranaki, par l’intermédiaire des clans maoris locaux, de mener en son nom des actions en justice pour se préserver de toute une variété de menaces environnementales. Bon, la montagne se défendait déjà bien elle-même. En randonnant autour de la bête, les sentiers encore enneigés et verglacés toujours très escarpés m’ont procuré quelques palpitations inopinées qui ont fini par me ramener à une altitude plus raisonnable pour la saison et mon équipement.

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300 km à l’est le parc national du Tongario abrite trois volcans toujours actifs (la dernière éruption date de 1977) On y profite d’une des plus belles randonnées du pays. L’une des plus fréquentées aussi mais miraculeusement à cette période de l’année j’étais seul. La neige bien qu’étant en train de fondre masque presque trop les couleurs rouge orangé des roches et les bleus azur et turquoise des lacs encore en partie gelés. En traversant les lieux parcourus par les coulées de lave les plus récentes le paysage offre un curieux air de désert au milieu de ce pays verdoyant.

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Ma toute dernière exploration Néo-zélandaise sera pour le Northland. Cette longue péninsule au nord d’Auckland aura été une agréable surprise. J’ai beaucoup aimé emprunter la plage de 90 miles beach qui a marée basse fait office de route sur plus de 70km. Pour quitter cette plage il faut s’engager directement dans le lit sablonneux d’un ruisseau qui serpente entre d’énormes dunes de sable blanc. Sur l’autre rive de la péninsule j’ai découvert sans m’y attendre le lieu ou le « Rainbow Warrior » repose désormais. Le navire de Greenpeace qui entreprenait des actions de protestation contre les essais nucléaires réalisés par la France en Polynésie à été coulé dans le port d’Auckland par des agents des services secrets français envoyés sur ordre du gouvernement de Laurent Fabius et François Mitterrand en 1985. Une action honteuse, indigne et inexcusable qui en plus de provoquer la mort d’un homme présent sur le bateau déclencha une colère inédite des autorités Néo-zélandaises qui vécurent là l’unique attaque de type militaire sur leur territoire. Aujourd’hui encore certain Néo-zélandais ne manque pas une occasion de nous le rappeler. Le scandale politico-diplomatico-judiciaire qui suivit fut l’objet de grandes tentatives d’étouffement de l’état français. Etat qui finalement reconnut bien plus tard sa responsabilité en indemnisant notamment Greenpeace d’un chèque de plus de 8 millions de dollars. L’épave du Rainbow Warrior à été remorquée et définitivement coulée au fond de cette très jolie baie dominée par un gros promontoire en haut duquel un mémorial très poétique à été construit. Un grand arc dans le ciel, sans couleurs, mais solide comme la roche.

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C’est sur cette note que s’achève mon année en Nouvelle Zélande, un pays qui m’aura fait osciller en permanence entre émerveillement et désillusions et c’est tant mieux. Le voyage c’est aussi sortir des ses rêves pour plonger dans la réalité du monde.

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Trêve hivernale

Nous sommes fin mai et c’est à cette époque de l’année que le pays entre en hibernation. Les touristes si nombreux tout l’été se sont raréfiés, de nombreux campings , auberges et agences touristiques ferment boutique pour les trois mois à venir. Seules les stations de ski maintiennent un peu d’animation dans l’arrière pays.

La froideur de l’hiver m’a poussé vers la ville. Avec ses 300 000 habitants Christchurch est la seconde ville du pays et la plus grande de l’île du sud. Située sur la côte est, à l’entrée de la péninsule de Banks, la ville s’est développée comme une tache d’huile dans une grande plaine marécageuse. Son climat tempéré et peu pluvieux est un atout appréciable dans le pays.

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Le centre ville est enceint dans un rectangle parfait, judicieusement surnommé, « the four avenues ». Mais ce centre ville en a surtout le nom et assez peu l’aspect, l’histoire récente aggravant le phénomène. En 2011 la ville fut touchée par le pire séisme de son histoire, tuant 185 personnes et détruisant ou rendant trop dangereux des milliers de bâtiments dont l’emblématique cathédrale au centre du centre ville. Sept ans plus tard les stigmates de l’événement sont encore très visibles et toujours très présents dans les conversations des habitants de Christchurch.

Aujourd’hui dans le centre ville, l’on  trouve encore de grandes esplanades de graviers à la place des bâtiments détruits, parfois transformées en parking, encadrées de vieux immeubles condamnés recouverts de tags. D’autres zones ont été reconstruites avec des immeubles modernes sans charme. La structure en quadrillage très aérée n’as pas été modifiée par la reconstruction, ce que je trouve dommage. Je pense que Christchuch avait là une opportunité fabuleuse pour créer un concept urbanistique qui tranche avec la fadeur des villes du nouveau monde, une page blanche inespérée pour transformer un désastre en chance mais qui n’a pas su être complètement saisie par les décideurs de la ville.

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Symbole de la cité et de l’attachement des habitants à un certain conservatisme, la cathédrale anglicane du XIX siècle, complètement éventrée, sera après des années de palabre, démontée pierre par pierre pour être reconstruite à l’identique, malgré le coût faramineux d’une telle solution.

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Autour du centre, les nombreux « suburbs » s’étalent sur plus de 15km dans toutes les directions. Je les arpenterais tous à vélo dans toutes les directions en faisant des livraisons de repas avec cette étrange impression d’être constamment en train de rouler dans la même rue sans fin. Des pavillons sans étages avec leur bout de jardin et leur clôture fatiguée tout du long, puis à l’intersection, une épicerie, peut être un fish and chips et un coiffeur, un peu plus loin une école à coté d’un grand parc et enfin à la frontière de deux quartiers un grand centre commercial qui fait office de centralité.

Linwood est une banlieue assez pauvre mais adjacente au centre. C’est ici que Mike et Erika, un couple du genre « hippies septuagénaire et militants actifs pour la légalisation du cannabis », gèrent cette petite auberge. C’est un lieu convivial qui échappe miraculeusement à l’hyper réglementation néo-zélandaise. Les backpackers comme les touristes fuient l’hiver austral tant est si bien que quelques semaines après mon arrivée nous ne sommes plus que deux occupants. Daniel, un allemand mélomane au caractère discret et agréable sera mon coloc pendant deux mois. Mike qui est un grand bavard passe de temps a autre, presque plus pour discuter que pour récupérer nos loyers hebdomadaires.

Je travaille de l’autre côté de la ville à décharger des conteneurs. Je mets en palette des meuble made in China, des chaussures made in India, des pièces détachées de tracteur made in USA, de la poudre de coco made in Thailande, des chauffe-eau made in France, de l’huile de canola made in Malaysia, des tests de grossesse made in Jesaispas-où, des vélos électriques made in Taiwan, des raisins secs produced in Turkey et bien d’autres choses encore. C’est beau la mondialisation, je voyage à travers les conteneurs … Ce travail est en fait très peu enthousiasmant, mais bon, faut bien je paye mes «  éternelles » vacances. Les livraisons à vélo que je fais le soir et week-end me permettent de me détendre tout en complétant mes revenus.

Il faut dire que Christchurch est certainement la ville la plus favorable au vélo du pays et même de la région sud pacifique. Les politiciens de la ville partant du constat que la ville offre des conditions optimales aux cyclistes urbains à savoir un climat clément et aucune dénivellation ont mis les moyen pour développer la pratique du vélo. Des millions de dollars ont été investis dans des pistes cyclables souvent très bien conçues. (c’est assez rare pour le dire) Les bus de ville sont équipés de porte-vélo, un système de location en libre service à été créé (bien que très limité), des bornes de réparation (quelques outils et une pompe à vélo accroché à une base fixe) ont été installés dans différents lieux stratégiques et enfin il existe un atelier associatif d’auto-réparation qui se trouve être largement subventionné par la ville.

L’effort et la prise de conscience de la part des politiques locaux sont donc réels et il faut le souligner. Seulement voilà, une fois n’est pas coutume, les politiciens sont en avance sur leurs administrés.

La mentalité du « que bagnole » peinent encore à évoluer. Le vélo n’est toujours pas considéré comme un moyen de transport normal, même en ville. Beaucoup d’offres d’emplois en ville portent la mention « Vous devez avoir une voiture », quand bien même les distances restent raisonnables. J’ai d’ailleurs toujours affirmé avoir mon propre véhicule sans que cela pose problème in fine ! Lors de mes livraisons à vélo plusieurs personnes étaient surprises de voir arriver un cycliste, car ici beaucoup de livreurs font ce travail en voiture… Quand à cet atelier associatif auquel j’ai apporté mon aide il m’a laissé un drôle de sentiment. En France ce genre de lieux, que je kiff grave, sont, disons le sans complexe et en toute amitié, des gros repère de gauchistes écolos qui s’échangent des graines bio et fabriquent eux même leur shampoing. J’appartiens peut être à cette caste, mais c’est pas à moi de le dire ! En Nouvelle Zélande la dimension militante est totalement absente des motivations des principaux acteurs de cet atelier. Leur vision de la place à donner au vélo dans la société actuelle est à peine plus élaborée que chez la plupart de Kiwis. En fait ce qui les motive chaque semaine à donner de leur temps, c’est cet esprit civique et communautaire qui est une qualité appréciable des cultures anglo-saxonnes.

En effet si les Français devaient s’inspirer d’une valeur néo-zélandaise cela serait sans hésiter leur honnêteté et leur sens civique du quotidien. Grâce à ces préceptes la confiance entre les gens peut s’établir beaucoup plus naturellement. La bonne confiance entre les citoyens et les institutions permet par exemple au DOC (Departement of conservation, équivalent du ministère de l’environnement et du tourisme) de créer des campings dans des endroits magnifiques où les usagers s’auto-enregistrent et payent leur nuitée en laissant l’argent dans un genre de tronc d’église. Tout le monde joue le jeu et les installations ne sont que très rarement vandalisées, même en ville. Impensable en France ..

Très scrupuleux quant au respect de chaque réglementations, obsédés par la mise en sécurité de toutes les activités les Kiwis ont choisi de vivre cette valeur dans l’excès. C’est, semble-il, un excès un peu flippant mais très souvent inoffensif .

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Avant de quitter la ville, je vais faire un tour sur la péninsule de la Banks où il y a un faux-vrai village français. Akaroa fut le lieu d’une tentative de colonisation française au 19ème siècle. L’expédition d’une quarantaine de colons aurait pu faire basculer l’histoire du pays. Mais manque de chance les Français arrivèrent trois semaines après la signature du traité de Waitangi entre les chefs Maoris et les Anglais ruinant les espoirs de revendication des Français. Ils s’installèrent pourtant, créant le village d’Akaroa. La petite communauté française finit au fil du temps par se dissoudre dans la population anglophone et l’histoire fut lentement oubliée jusqu’au début des années 60. C’est à cette époque que le maire du village recréa de toute pièce l’identité française du village, ressuscitant toute une collection d’anecdotes francophiles, renommant toute la voirie en préférant le mot « rue » au mot « street » et « gendarmerie » en lieu et place de « police station ». Toute cette comédie ayant pour objectif de redynamiser le tourisme du lieu. Ça a marché, aujourd’hui en plus des quelques descendants directs des colons français (mais qui ne parlent plus le français) une dizaine de nos compatriotes se sont installés à Akaroa faisant vivre à nouveau un peu la francité du lieu en animant notamment la boucherie, la boulangerie, la crêperie du village…

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Autour du village, la péninsule de la Banks offre de très beaux paysages.Il s’agit en fait d’un vieux volcan éteint au pentes érodées et au cratère immergé dans la mer qui crée aujourd’hui la baie d’Akaroa. Des petites collines ardues qui me remettent en jambes pour le prochain épisode.

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Patapoufissime

Plein Sud! Il y a des voyageurs qui collectionnent les points records de chaque pays (si si vous savez, le point le plus au sud/nord/est/ouest, le plus haut, le plus proche ou éloigné de tel autre point symbolique etc ..) comme d’autres collectionnent les timbres, les pièces de monnaie ou les capsules de bière. Je trouve ça un peu con con, et cela malgré une enfance assumée de copocléphile. Tout ça pour dire que si je vais tout au sud d’un des pays le plus au sud de l’hémisphère sud c’est simplement parce que heu… ça a l’air chouette !

D’ailleurs une fois à Bluff, ville la plus méridionale du secteur il va sans dire, on n’est toujours plus éloigné du pôle sud que Paris ne l’est du pôle nord. Constatation un peu décevante, pourtant je n’ai jamais été aussi proche du pole sud.

Un peu en dessous de Bluff (terme géographiquement incorrect et exacerbant mais j’ai épuisé mon quota d’utilisation du mot « sud ») il y a l’île Stewart, troisième plus grande île de Nouvelle-Zélande. Je prends le ferry pour l’île bien que cela n’influe pas sur la constatation décevante énoncée ci-dessus.

Sur cette île, il y a un village de 400 kiwis bipèdes et un parc national de 15 000 kiwis à plumes. Je randonne joyeusement sur des sentiers très boueux et le long de grandes plages désertes. Les petites îles de la Nouvelle-Zélande sont souvent des sanctuaires écologiques où de nombreuses espèces d’oiseaux endémiques survivent grâce à un contrôle strict des nuisibles apportés par l’homme tels que les rats et surtout les opossums. Il y a aussi une belle population de cerfs. Importés du canada et relâchés sur l’île dans les années 30 pour le plaisir de la chasse. Ils assument encore aujourd’hui très bien leur job de gibiers. La chasse (et la pêche) est extrêmement populaire dans le pays. Elle fait partie intégrante de la « outdoor culture » kiwi. Des gens qui aiment la nature avec un 4×4, une caisse de bière et un fusil. Les chasseurs s’installent pour une semaine en général dans une hut. Leur première proie est destinée au BBQ quotidien et toutes les suivantes sont tuées juste pour le sport. Quand ils abattent un bel animal, une photo-trophée du chasseur et du quadrupède vaincu s’impose. Toujours la même, la tête du cervidé est maintenue par les bois, les deux acteurs partageant désormais ce même regard vide. Les plus motivés ramèneront la tête en souvenir, ça fera joli au dessus du garage.

Bon, une fois ces moqueries faciles dites, il faut admettre aujourd’hui le rôle nécessaire de la chasse en Nouvelle-Zélande et ailleurs. Sans régulation de certaines espèces sauvages des écosystèmes entiers s’écroulaient. Bien que dans l’absolu, l’homme soit toujours le primo-responsable du déséquilibre. Sans partager le style, la façon et les motivations, on peut saluer le service rendu par les chasseurs malgré tout.

De retour sur le « continent », je longe la côte dite des Catlins. Je découvre des animaux toujours plus patapoufissimes : les lions de mer. Alors que leurs cousines otaries, qui vivent aussi sur cette côte, aiment la glandouille sur rochers, les lions de mer sont plutôt du genre plagistes. Ils sont bien plus gros que les otaries et paradoxalement plus rapides à la course sur terre surtout quand ils se chamaillent entre eux. S’ils ne sont pas en mer pour chasser le poisson, ils passent le plus clair de leur temps affalés dans le sable à roupiller.

J’ai une anecdote à base d’otarie qui fait marrer tout le monde donc la voilà. Il est important de ne jamais se mettre entre la mer et une otarie, la mer est en quelque sorte leur sortie de secours et si cette sortie est bloquée cela provoque chez elles un stress intense. Il y avait donc cette otarie qui pour une fois était  à la plage mais en bordure de falaise en haut de la plage pour je suppose avoir un peu d’ombre. Comme elle semblait dormir paisiblement, j’ai supposé qu’elle ne me remarquerait pas si je passais devant. Je pouvais en aucun cas pas passer derrière à cause de la falaise. J’avance prudemment au ras de l’eau quand soudainement la bête de dresse, sort les crocs, pousse des cris déterminés qui sont un mélange d’aboiements de chien malade et de hennissement d’âne hoqueteux, tout en se ruant vers moi. Face à cette attaque virile et méritée, ma seule issue fut la fuite ventre à terre. Oh t’as ris !

Au bout des Catlins je passe sur la cote est de l’ile du sud, je traverse la ville de Dunedin, deuxième plus grande ville de l’île située à l’entrée d’une grande péninsule où l’on peut observer tous ensembles lions de mer, albatros et manchots notamment.

A Dunedin il y a un de ces records absurdes et rigolos que les locaux affectionnent tant. Mais celui-ci je ne peux pas passer à coté. Baldwin Street est, paraît-il,  la rue la plus en pente du monde, avec une déclivité maximum de 36%. (pour info une pente de 20% est déjà considérée comme très très raide)

Je grimpe à vélo en haut de l’attraction sans trop de problème. La rue ne fait que 300m de long, pas assez pour m’impressionner. Je décide donc d’y retourner le lendemain mais avec la remorque attachée au vélo pour que le challenge soit à la hauteur de ma puissance. J’échoue, à l’instar des lions de mer. J’ai beau pousser aussi fort que possible sur les pédales et tirer en même temps sur le guidon pour avoir un maximum de force Baldwin street gagne à chaque tentative. J’ai tout de même un exploit à mon crédit, j’ai réussi à casser le boîtier de pédalier du vélo en forçant autant dessus.

50$ de boîtier de pédalier plus tard, je remonte à contre courant l’un des plus beaux itinéraires cyclables du pays vers le parc national du Mont Cook, sommet du pays. Cette piste cyclable, si je peux me réjouir de son existence, a quelques anomalies typiques du pays. Comme les conducteurs kiwis ont une certaine résistance à partager la route avec les cyclistes, à chaque fois que l’itinéraire suit une route de campagne goudronnée et déserte il y a un un chemin en gros gravier pénible à emprunter, construit juste pour les cyclistes. Le-dit chemin est parfois complètement clôturé ce qui vous empêche de rejoindre l’asphalte délaissée. Mais c’est une broutille à côté de ce qui arrive. En allant vers le parc national on entre dans une large vallée occupé par le lac Pukaki, la route passe à l’ouest et la piste cyclable à l’est. Vous allez me dire à juste titre « et alors ?». Et alors au bout du lac côté est il faut franchir une chaotique rivière alimentée par l’eau de fonte des plus grands glaciers du pays. C’est clairement impossible, heureusement la brochure récupérée à l’office du tourisme indique la marche à suivre. Au point où j’en suis je vais me passer de qualifier ce gag : il faut appeler l’aérodrome local et franchir la rivière en hélicoptère, 130$ pour faire quelque centaines de mètres. Mais non Maman je veux pas faire de l’hélicon pon pon pon … 8km après, la route et la piste cyclable se terminent en cul de sac à l’entrée du parc national…

Les glaciers sont encore là, époustouflants, puissants, créateurs et destructeurs, et pourtant déjà condamnés.

Plus de photos patapoufs ici!

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Un fjord pour les gouverner tous

Je suis emmitouflé dans ma polaire, bonnet bien en place et chaussette en laine. Il fait 2 ou 3 degrés et la météo annonce de possibles chutes de neige. Une semaine plus tôt avec Iris au même endroit, sur la rive du lac Wakatipu dans le centre ville de Queenstown nous étions en T-shirt. L’hiver est arrivé en une nuit, il est en avance et bien revigorant. Queenstown est la capitale des sports à sensations fortes, jet-boat, saut à l’élastique ou en parachute, ski alpin, vtt de descente et autres folies. Moi j’ai la forte sensation que ce n’est pas mon truc. J’attends tranquillement le ferry qui doit m’emmener sur l’autre rive du lac, bien loin de cette petite bourgade hyperactive. Le ferry en question est d’un autre siècle. Il s’agit d’un très élégant bateau à vapeur du début du vingtième siècle ; et il fonctionne toujours avec cette énergie d’un autre siècle : le charbon. Le charme de l’époque est totalement conservé, la salle des machine bénéficie de grandes ouvertures pour permettre aux passagers d’admirer la mécanique et le chauffeur (celui qui alimente les fours en charbon). La chaleur de la chaudière remplit aisément le pont principal ou un pianiste en costume joue une musique d’ambiance. On pourrait facilement imaginer être l’un des 120 000 soldats néo-zélandais engagés volontaires de la première guerre mondiale de retour d’Europe après quelques années de joyeuse et stupide guerre en 1918.

Ce bateau figé dans une époque révolue qui navigue sur un lac immuable a tort de nous faire oublier 2018. Le charbon qui le propulse chauffe également aujourd’hui de nombreuses habitations du Central Otago. Cela déclenche cette situation hilaro-tragique où sur un territoire de taille comparable à l’Île-de-France mais 500 fois moins peuplé il y à des problèmes de pollution atmosphérique. Même si par souci d’honnêteté il faut préciser que le contexte géo-climatique local favorise les accumulation de saloperies dans l’air, ben ils font très fort !

Bref, revenons à nos moutons, c’est contextuel. Je fais désormais face à la ville depuis mon bivouac en bord de lac. La neige qui tombe en même temps que la nuit ne se maintient qu’à 50m d’altitude au dessus du lac car celui ci rend subtilement la chaleur qu’il a accumulée tout l’été. Le lendemain la longue et paisible piste que j’emprunte vers Ti Anau traverse un grand plateau cerné de montagne en pleine mue hivernale. La neige n’as pas tenu sur la piste bien longtemps et mon principal challenge restera le passage de certaines rivières à gué. Peu profondes, mais parfois larges, l’idée d’enlever mes chaussures et de plonger mes pieds dans cette eau glaciale me fait changer de couleur parce que je suis une grosse mauviette de l’eau froide. Mais l’idée de traverser ces cours d’eau sur le vélo au risque de m’enfoncer dans le sable et de devoir mettre pied et chaussure dans l’eau m’angoisse autant.

Je campe à nouveau au bord d’un lac. Plus petit et tout en longueur, le lac Mavora est entouré d’une belle forêt de hêtre, un classique de la région. Les vrais fans savent que l’on est en fait sur la rive de la rivière Anduin. La communauté est attaquée par un groupe d’uruk-hai lancé à leur poursuite par Saruman. Boromir meurt héroïquement dans l’affrontement, Merry et Pippin sont kidnappé par les uruk-hai. Fredon dans la confusion de l’instant monte dans une barque et choisit de poursuivre seul le chemin du Mordor, il est le porteur de l’anneau, et affronte son destin. Sam son ami de toujours se jette à l’eau et manque de se noyer pour le rejoindre. « J’ai fait une promesse Monsieur Fredon ! ». Sur la rive, Aragorn, Legolas et Gimli regardent Frodon et Sam s’éloigner avant de se jeter à la poursuite des ravisseurs de Merry et Pippin.

Alors oui, vous pouvez arrêter de poser la question, j’ai vu des hobbits, et même un elfe, un nain, des orques… voilà.

Ti Anau est une autre ville de la taille d’un village avec son lac et ses montagnes, y’a pas raison de s’en passer. C’est un très grand lac avec des larges bras qui s’engouffrent dans les vallées adjacentes comme des petits fjord. Peut être pas un hasard, c’est d’ici que l’on entre dans la région du Fiordland. Région forestière et montagneuse très humide et pratiquement inhabitée.

Des centaines de milliers de touristes, ouais, des centaines de milliers de touristes transitent chaque année dans la ville pour admirer le fjord du Milford Sound. Ce fjord, et d’autres moins facilement accessibles, est un bout d’océan Pacifique coincé entre deux véritables murailles naturelles de plus d’un kilomètres de haut. Les montagnes ici sont parfaitement verticales comme si elle refusaient de s’éroder malgré les pluies diluviennes qui abreuvent généreusement des centaines de cascades.

Je suis scandaleusement veinard le jour où je grimpe en haut du col qui surplombe le fjord, le ciel est d’un bleu inhabituellement immaculé. Il y a encore, ou déjà, 30cm de neige sur le sentier et c’est joli, ça glisse, ça rentre dans les chaussure, c’est froid et c’est très beau. L’effort est mille fois récompensé. La vallée qui s’ouvre sur le fjord est là toute entière sous mes yeux, avec ces imposants colosses de roche brute qui s’imposent tels des gardiens autoritaires de part et d’autre du grand corridor forestier.

Il y a  un kéa pour m’accueillir au sommet. Les kéas sont la seule espèce de perroquet alpin au monde. Des sacrés farceurs qui ont cette géniale habitude de s’en prendre aux pneus de voiture (ou vélo), essuie-glace et toile de tente, … Espèce de Punk à plumes !

Clique mon poto, pour les photos

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De l’eau au vin

Le fantail (queue eventail), oiseau typique des forêts néo-zélandaises

La sauvage et dépeuplée côte ouest de l’île du sud se dévoile sous mes roues sans difficulté notoire, révélant toujours plus de forêts denses, sources d’eau chaude avec vue sur les glaciers, lacs apaisants, cascades et même un petit cyclone tropical qui est descendu jusque là. J’ai pu faire du 45km/h sans donner un coup de pédale grâce au vent dans le dos, je devais même parfois freiner pour me maintenir cette vitesse. Expérience intéressante mais que je ne recommanderais pas à des cyclistes inexpérimentés, de puissantes rafales de vent d’au moins 80km/h surgissaient sans prévenir de coté rendant le vélo singulièrement ardu à contrôler.

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Après le village de Haast capitale régionale de 300 habitants, la route quitte la côte et franchit le modeste mais essentiel col du même nom. En effet le col de Haast m’envoie à l’est de la chaîne montagneuse des Alpes Néo-zélandaise. En un instant le monde change. Les pluies diluviennes qui arrivent toujours de l’ouest et arrosent copieusement la côte et le versant ouest du massif peinent à franchir la ligne de crête. La région qui s’ouvre au sud-est dispose d’un climat beaucoup plus sec et continental. Le vert des forets devient le jaune des prairies de fin d’été, le ciel s’ouvre chassant le gris des nuages et découvrant plus du blanc des glaciers, le bleu turquoise de la mer fait place au bleu plus sombre et plus mystérieux des lacs. Le « Central Otago » offre là encore de sublimes tableaux de la nature. Les grandes montagnes aux pics acéré s surplombent des vallées libres et herbeuses dont les rivières tumultueuses alimentent de grands lacs limpides creusés par les anciens glaciers.

Wanaka est la première ville sur ma route après des semaines et l’atmosphère qui s’y dégage retient pour un temps déraisonnable presque tout les voyageurs fatigués par les pluies de la cote ouest. Le centre ville est bordé par une plage en bord de lac sur fond de montagnes magnifiques dont la contemplation est une activité peut être chronophage mais sans danger. Après quelques jours de prélassage intempestif je décide de chercher un boulot dans la ville simplement pour y passer un peu plus de temps. Seulement voilà, tout ce qui se présente à moi comme job à cette période de l’année sont des temps partiels pour faire la plonge dans les restos, je gagnerais à peine de quoi vivre sur place. Wanaka à tout de même un défaut, la vie y est encore plus chère qu’ailleurs.

En élargissant mon champ de recherche je trouve une mission de quatre semaines dans une « usine à vin » à Cromwell 60km au sud. En effet le climat quasi semi-désertique (a peine plus de 400mm de pluie) et le fort ensoleillement sont excellents pour la viticulture. Le principal cépage de la région est le pinot noir et la qualité des vins du Central Otago est unanimement reconnu par les connaisseurs. L’apparition de ces vignobles avait d’ailleurs donné de grandes angoisses aux Bourguignons, autres grands maîtres du pinot noir, qui voyaient là une concurrence directe et sérieuse. Mais pas de panique, le pinot noir version Néo-zélandaise a développé son propre caractère, sans faire ombrage à notre production nationale.

Ici la plupart des vignerons cultivent les vignes et récoltent le raisin mais ne font pas eux même le vin. Ils font appel à une entreprise tierce qui prend en charge tout le processus de vinification du pressage des grains jusqu’à l’embouteillage. Évidement les vignerons ramènent leur poire à chaque étape importante, supervisant parfois chaque détail comme si le monde en dépendait. D’autre vignerons, qui souvent produisent des vins moins chers, semblent être là en simples touristes et prennent même des selfies avec les bouteilles fraîchement produites.

Je travaille à l’embouteillage. N’est-ce pas un comble pour un cycliste!? Chaque matin Maria, l’énergique responsable de notre équipe nous fait la présentation de notre journée de travail à venir, énumérant pour chaque vin le nombre de litre, le type et la taille des bouteilles, le taille des cartons de 6 ou 12 bouteilles, les différents types d’étiquettes, si le vin est destiné a l’export etc… On me propose souvent de rentrer en fin de journée avec une ou deux bouteilles, ce que j’accepte avec joie, surtout après avoir remarqué que celles-ci peuvent être vendues 50$ au supermarché local.

Alors que ma mission à Cromwell s’achève, l’automne prend doucement place dans les vallées et les premières neiges tombent sur les sommets. Mais paf, presque sans prévenir voilà la petite Iris, que j’avais laissée sur le sentier du Te Araroa, qui déboule pour chauffer l’ambiance. Iris est arrivée avec panache au bout du bout de l’île du sud après des milliers de km de randonnée. Elle brandit ses bâtons de marche vers le ciel comme une guerrière après la victoire. Cette longue marche a sculpté ses muscles de façon incroyable et transformé sa méga-motivation en super-ultra-motivation. La nouvelle Iris veut conquérir le monde des sentiers, traverser chaque continent par petites foulées et escalader chaque montagne qui existe. Faites gaffe, elle arrive.

Nous partons pour une petite semaine de marche dans le parc national du mont Aspiring. La rando que j’ai repérée est assez difficile mais restera la plus belle du pays. Le climat mous offrira le pire et le meilleur ; Orages, gel, pluie et vent et grand soleil sur des sentiers très aériens qui zigzaguent entre les glaciers.







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ça jette un froid

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Instinctivement la côte ouest de l’île du sud m’appelle, sauvage, dépeuplée, climat dantesque, coincée entre mer et montagne. Elle m’appelle donc j’y vais sans autre réflexion. Je zigzague cependant sans précipitation entre les fjords au nord de l’île et les collines qui protègent la ville de Nelson. Je profite d’un quotidien qui est mien, où ma seule contrainte est ma liberté. Le temps clément ne m’incitant guère à y renoncer.

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C’est alors que je m’engage sur une vieille piste de VTT peu fréquentée, 50km de piste forestière, même si la route est mauvaise je devrais aisément parcourir ça dans la journée. En fait pas du tout. Encore une fois je me suis jeté sans l’aide de personne dans une galère innommable. Les pentes sont trop fortes autant en montée qu’en descente, je pousse le vélo avec rage sur de mauvais graviers qui m’empêchent de profiter des descentes en les rendant tape-cul et glissantes. Au kilomètre 20 une grande rivière me bloque la route, 50m de large et 1m de profondeur. Les ponts coûtent cher et beaucoup de passages de rivières sur les routes peu fréquentées du pays doivent se faire à gué. Je décide que je suis trop engagé sur cette piste pour renoncer à ce stade. Il me faut faire quatre allers retours pour franchir l’obstacle. Je porte mon vélo au dessus des flots sur l’autre rive puis déleste une partie du contenu de la remorque dans mon sac a dos afin  d’alléger suffisamment cette dernière. De crainte de perdre l’équilibre à cause de la force du courant je fais deux allers retours sac a dos avant de porter la remorque de l’autre coté. La piste s’élève ensuite bien au dessus de la forêt, je passe un col en fin de journée, épuisé, satisfait du panorama mais à seulement 35km de mon point de départ. Les nombreux ruisseaux me procurent l’eau nécessaire à mon bivouac. Enfin ça c’était avant qu’il ne se mette à pleuvoir. La côte ouest de l’île reçoit une quantité de pluie comparable à un climat tropical, simplement il fait moins chaud. Au matin ma piste est sous l’eau, je patauge dans 10 à 20 cm d’eau, les rivières ont pris un aspect effrayant alors que la pluie ne fait que commencer. Je parviens non sans peine à rejoindre la route, puis la ville de Westport où je me réfugie dans une auberge.

Tout au long de mon parcours sur la côte ouest j’apprendrai à jouer à cache cache avec ces puissants épisodes pluvieux quasi-hebdomadaires.

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Greymouth, la plus grande ville de la côte ouest a une population de moins de 10 000 habitant, et les localités de plus de 300 habitants permanents le long des 500km de route côtière se comptent sur les doigts d’une main. L’essentiel du trafic routier est composé de touristes qui déambulent dans toute une variété de véhicules de location allant de l’énorme camping-car à la petite voiture citadine, en passant par toute une gamme de vans aménagés avec en fonction de votre budget douche, toilette, cuisine à bord. C’est qu’en Nouvelle-Zélande, comme dans certains autres pays riches du nouveau monde, vous n’êtes pas un humain complet si vous n’avez pas votre grosse boîte de fer à énergie fossile. Les transports en commun sont anecdotiques (deux bus par jour entre les deux plus grande ville de l’île du sud) et cher. Le service de train qui relie Greymouth à Christchurch n’est maintenue que pour les touristes, pour le prix d’un aller simple en train vous faite un aller-retour aisément en avion.

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Toujours plus au sud, la chaîne des Alpes Néo-zélandaise révèle l’une des plus grandes merveilles de la nature. Un glacier à la situation unique au monde. Le Glacier Franz Josef, mais également son voisin 40km au sud le glacier Fox, prend sa source dans le massif du mont Cook sommet du pays et dévale le flanc ouest de la montagne sur une distance encore modeste de 12km mais surtout jusqu’à une altitude de seulement 300m et quelques km de la mer. Si la glace se maintient si bas à une telle latitude (en latitude équivalente cela correspond a Carcassonne en France) c’est notamment grâce aux très fortes précipitations que reçoit la région. La neige s’accumule au somment du glacier, se tasse sous son propre poids devenant ainsi de la glace qui sous l’effet de la gravité fait avancer le glacier. Plus le glacier est alimenté en neige plus il est rapide et plus il s’étant, la glace arrivant si vite à basse altitude (vitesse toujours relative pour un glacier mais tout de même, plus de 2km par an pour Franz Josef, soit 20 fois plus rapide que la mer de glace en France) qu’elle n’a pas le temps de fondre avant. Ce qui me fascine et m’émerveille c’est de voir cet imposant être de glace et seigneur du froid traverser cette foret dense et humide, sorte de jungle de pays tempéré toujours animée de nombreux chants d’oiseaux.

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Sans surprise le glacier est en fort recul, en quelques décennies il a perdu les deux tiers de sa masse et a reculé de plus de 600m, un autre géant qui agonise. En effet les glaciers ont cet atout, s’il en fallait un, d’être une illustration tragique et spectaculaire du réchauffement climatique. 250 000 touristes par an peuvent en être les témoins chaque année à Franz Josef glacier. Je ne fais pas partie, ou peut être je ne fais plus partie, de ces voyageurs un tantinet prétentieux qui éructent de vilains termes lorsqu’ils transitent par un lieu où le tourisme de masse a fait son nid. Je visite le monde tel qu’il est, et non pas tel que je voudrais qu’il soit. A ce titre les touristes sont mon attraction touristique puisqu’ils façonnent et déforment parfois très fortement nos espaces et deviennent acteurs à plein temps de nombreuses sociétés. Bien sur, je critique et aujourd’hui je vais pas me gêner.

Je suis abasourdi par le modèle touristique développé par la Nouvelle-Zélande.. Toute la journée au dessus du glacier des dizaines d’hélicoptères vrombissent pour offrir aux touristes une vue imprenable, la chose a d’autant plus d’intérêt de nos jours que la face terminale du glacier s’éloigne inexorablement de la plate-forme d’observation accessible à pied. Le glacier est devenu très instable à cause de cette fonte accélérée, mais les hélicoptères vous emmèneront fouler du pied la glace à une plus haute altitude. Il existe toute une gamme de tours en helico pour (presque) toutes les bourses, je peux citer parmi mes préférés : Le tour « demande en mariage en haut du glacier » (comme ça si la fille dit non, ben ça jette un froid et le glacier va mieux….?) Le tour « glacier et apéro » petits fours et pinard sur la calotte ! Mais le meilleur du pire, qui m’a valu une brutale chute de tension suivie d’une intense dépression nerveuse de plusieurs minutes c’est le fameux « Heli-bike tour » (Rien à voir avec le vélo d’Elie évidement) Le principe de ce cauchemar est de prendre un VTT en haut de la montagne avec vous dans l’hélico pour faire 15 ou 30 minutes de descente avant d’être récupéré par l’hélico vers une autre descente, ou l’apéro.

Si vous avez peur de voler vous pouvez toujours prendre place dans un « jet-boat » petites embarcation dont la propulsion se fait grâce a un puissant jet d’eau sous pression. Une invention locale qui fait la fierté de nombreux Kiwis. Les jet-boats remontent les rivière à tout berzingue dans un vrombissement à déclencher des avalanches qui couvre les « ouhhhh » et les « whaaaaaa » des touristes fagotés dans leur gilet de sauvetage et imperméable. Il y a toujours le classique tour en 4×4 entre les pâturages si votre empreinte carbone et encore un peu mollassonne.

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Oui c’est flou parce que c’est crade.

Bien sûr il y à la rando, un peu de kayak et autres activités nature qui sont proposées aux touristes mais sans exagérer ça devient anecdotique par rapport à ce que je viens de décrire.

La Nouvelle-Zélande pratique une écologie cosmétique, une écologie d’apparat, la sauvegarde des espèces endémiques n’a pas de sens si tout l’écosystème ploie face au changement climatique et si les Néo-zélandais ne remettent pas eux-mêmes en cause leur façon de consommer et de se divertir. Mais je ne veux pas rejeter toute la faute sur les kiwis qui sont par ailleurs des gens adorables. Les paysage réellement sublimes que j’ai pu voir ont grandement contribué au mythe de la Nouvelle-Zélande super-verte, mythe sur lequel les différents gouvernement se sont subtilement appuyés mais ne serait-ce pas nous les européens qui le voulions. Je pense que notre imaginaire collectif à appliqué à la Nouvelle-Zélande son fantasme d’un éden terrestre verdoyant, le fantasme de la contrée lointaine tout au bout de la carte, tout au bout du monde, nous en ignorons tout mais ça serait tellement bien d’y aller. Les Néo-zélandais se sont simplement saisi de notre espérance pour nous vendre ce qu’ils pouvaient.

D’une façon ou d’une autre j’ai cru à ce mythe avant d’arriver dans le pays. J’ai vu ces paysages fabuleux, ils sont réels et leur beauté ma envoûté, mais j’ai vite perçu qu’a côté de la carte postale tout n’est pas vert. Alors j’ai un message à tout ceux, dont des amis, qui m’ont dit après y voir été, que la Nouvelle-Zélande est leur ou un de leur pays préférés :  « Vous n’avez pas su observer ce pays, vous avez été le touriste que vous méprisez tant parfois. Et parce que vous n’avez pas voulu regarder de l’autre côté du paravent, vous avez contribué à entretenir cette réalité incomplète et inexacte à laquelle les Kiwis eux même se sont mis a croire. »

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Une fois que TA

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La Nouvelle-Zélande n’est pas un pays écolo. C’est étonnant décevant voir navrant mais c’est ainsi. C’est certes un pays de Nature du fait de la faible densité de population, Nature qui à été mis en exergue comme un symbole du pays. Et pour cause le pays a bel et bien été doté de merveilles naturelle extraordinaires. Seulement voilà la Nouvelle-Zélande est un pays jeune au caractère capitaliste et consumériste où l’économie prévaut sur les autres priorités quel qu’en soit le prix à long terme et où le droit à la propriété privée est supérieure au bon sens. C’est dit.

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Je roule en direction de Wellington, la capitale, au sud de l’île du nord. J’emprunte un itinéraire peu fréquenté le long de la cote est. Quand foret native n’as pas été systématiquement remplacée par des prairies, elle à souvent été rasée pour faire place à de tristes plantations de pins. Les camions qui transportent les grumes sont par ailleurs des écrabouilleurs de cyclistes confirmés. Ce bord de mer est plutôt joli sans être non plus sidérant de beauté, je rencontre de grandes plages de sable dominées par des collines rondes de 300 à 500m d’altitude. L’une de ces collines, pas plus remarquable que les autres s’appelle Taumatawhakatangihangakoauauotamateaturipukakapikimaungahoronukupokaiwhenuakitanatahu. Oui il s’agit bien de l’un des plus longs toponymes au monde, les néo-zélandais on un goût un peu ridicule pour les records du genre. Aux quatre coins du pays on trouve des plaques célébrant la présence du plus, vieux, long ou grand pont, tracteur, arbre etc de Nouvelle-Zélande, de l’hémisphère sud ou du monde … Les seconds voire même les troisième de chaque catégorie peuvent également être certifiés par un splendide écriteau municipal.

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Je rejoins rapidement Wellington, non sans avoir salué amicalement une colonie d’otaries sur le chemin. Ces belles bêtes moustachues à l’allure patapoufoïde sont étonnamment agiles, même hors de l’eau sur les rochers où elles aiment se prélasser.

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Je ne reste pas Wellington, c’est que je suis attendu par Iris sur la ligne de départ du Te Araroa.

Iris est une jeune normande toute blonde que j’ai rencontré à Hastings, d’humeur sportive et rigolote; la belle se découvre une passion boulimique pour la randonnée pédestre. Le Te Araroa Trial, long itinéraire de randonnée de 3000 km qui traverse toute la Nouvelle-Zélande du nord au sud devrait a priori rassasier cette énergumène qui gigote d’impatience en agitant ces bâtons de marche dans les airs. L’un des grands atouts d’Iris en plus d’un sourire et d’un positivisme éclatant, c’est sa détermination inoxydable à accomplir ses projets. Quand on veut on peut, et je n’ai jamais douté que cette fille de 22 ans, nettement plus fine que son sac à dos, qui se lance mal préparée, mal informée, mal équipée et sans expériences atteindrait ses objectifs avec panache et style.

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Consciente de son inconscience, elle est ravie que je l’accompagne pour les deux premières semaines de son aventure.

Nous nous retrouvons à Havelock au nord de l’île du sud, capitale mondiale -dit la pancarte à l’entrée du village- de la moule verte où je peux laisser mon vélo en pension le temps de randonner.

Notre première section est la traversé du massif des Richmond, l’une des section les plus dures du Te Araroa. Les premiers jours nous évoluons sur de longs sentiers escarpés qui traversent d’épaisses forets humides à la chaleur étouffante. Nous dormons dans des « huts » en anglais, des refuges en français mais par souci d’authenticité je vais continuer  à parler de hut. Les huts sont de petites maisons plutôt bien construites, dotées selon les cas de 5 à 30 matelas, d’un point d’eau, de toilettes sèches et d’un poêle à bois. En contre-partie du payement d’un pass de 92 dollars nous pouvons dormir aussi souvent que nous voulons dans les huts, à condition que toutes les places ne soit pas déjà occupées par les « nombreux » autres randonneurs que nous croisons. Le camping à côté des huts est toujours possible heureusement.

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Le climat comme souvent en Nouvelle-Zélande peut être très pluvieux même durant l’été. Il y à des tas de ruisseaux, torrents et rivières à franchir, parfois avec de l’eau jusqu’à la taille. Ajoutez à cela de nombreuses zones marécageuses, les chaussettes de l’archi-duchesse sont rarement sèches archi-séches.

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Sur les sentiers du Te Araroa galope une population très hétéroclite. Nombreux sont ceux qui sont de vrais fadas de la rando, ils ont déjà parcouru la plupart des grands « trek » sur plusieurs continents, possèdent un équipement ultra-light, ultra-solide et ultra-cher et sont capable d’absorber les km de marche à une vitesse déraisonnable. Il y a des fous, qui parcourent en une journée ce que nous faisons en trois jours, ces derniers sont là pour le sport plus que pour la montagne. Iris et moi-même détonnons aussi plus par notre amateurisme apparent, moi en jeans, avec un sac toujours trop petit pour son contenu, Iris avec un incongru ukulélé dont je n’ai jamais entendu le son et son côté candide. Quelle que soit notre façon de marcher l’ambiance du Te Araroa est toujours bienveillante. Parfois face a la rudesse de la montagne les nerfs et le corps craquent sous le poids de trop d’efforts accumulés et chaque soir les occupants de la hut vous remonteront comme une pendule pour le lendemain. C’est que tous sont liés et unis par ce long sentier parsemé de balises orange qui nous guide. Sentier rapidement renommé le TA (à prononcé en anglais uniquement « the Ti hèè ») par sa communauté bipéde.

Notre communication avec Iris passe beaucoup par un duel perpétuel de taquineries et de moqueries amicales, caricaturant les mimiques de l’autre avec un réalisme surprenant. Notre duo comique est applaudi en silence par notre principal public en la personne de Corentin, un rêveur discret rencontré des le premier jour de marche, qui nous a aussi fait hurler de rire par la finesse de ses rares interventions.

La foret se transforme au fil du chemin et devient de plus en plus belle. Je suis fasciné par la mousse épaisse et vivace qui recouvre souvent tout ce qui est, les pierres, les arbres jusqu’à l’extrémité des branches, les troncs pourrissants des arbres du passé, le sentier lui même n’y échappant pas toujours. Lorsque nous gagnons en altitude les arbres se ratatinent et la mousse fait place à un lichen touffu qui ressemble à de la fausse barbe et qui habille de magie tout notre monde. Les Richmond nous offrent au détour d’un col ou d’un chemin de crête des vues inoubliables sur la mer, parfois à l’est de l’île, plus souvent à l’ouest vers la baie de Nelson. 

Nous arrivons enfin dans le village de Saint Arnaud après 10 jours intenses pour nous ravitailler en vivres et énergie. La section suivante, la région de « Nelson’s Lake » nous offrira pour huit jours d’été, des montagnes aux pentes bien plus accueillantes, des vues époustouflantes sur ces fameux lacs et de larges vallées couvertes d’une belle herbe dorée. Iris qui a franchi les Richmond dans la douleur et la souffrance donne désormais le rythme, et c’est à moi de m’accrocher pour tenir la cadence.

Notre sentier nous déposera à Hamner Spring, petite ville agreable du centre des Alpes néo-zélandaises où il est temps pour moi de revenir vers mon vélo et de laisser une Iris pleine de force continuer sereinement sa route initiatique.

Combo arc-en-ciel et coucher de soleil qui dit mieux?

 

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C’est trognon

Enfin! Je me suis accroché à l’idée d’aller en Nouvelle-Zélande comme un chacal sur un bout de gigot. J’ai consciencieusement ignoré tous les mous du genou qui me disaient « Bah laisse béton, Gros. Il y a plein d’autres endroits chouettes où aller » Enfin ! Je suis à l’aéroport d’Auckland. Mais tant que je n’ai pas passé toutes les formalités je refuse l’euphorie. Contrôle des passeports. Je n’ai jamais aimé cette formalité, encore moins à l’aéroport. On se trouve toisé de haut en bas comme étant un potentiel enquiquineur qui vient répandre sa tuberculose dans le pays. Pour que ça se passe le plus vite possible, je m’habille aussi correctement que possible à chaque frontière et je fais la queue derrière le guichet où le ou la douanière (c’est ça l’écriture inclusive?) semble la plus sympathique.

La Nouvelle-Zélande a une politique de bio-sécurité hyper-pointilleuse. J’ai réussi à montrer patte blanche et à prouver que je suis un individu sain et dé-tuberculisé, mon vélo, ma tente et mes chaussures de rando doivent en faire de même. Un gros moustachu qui rentre à peine dans son uniforme inspecte assidûment les pneus et les gardes-boue du vélo ainsi que mes chaussures de rando. Aucun bout de terre ne doit entrer dans le pays, d’hypothétiques germes potentiellement destructeurs pour écosystème très isolé de l’archipel pourraient s’y trouver. Pire encore pour les néo-zélandais, l’agriculture pourraient être ravagée par une vilaine bêbête invasive. Ma tente est aspergée d’un charmant produit chimique.

Il est 21h, je monte mon vélo avant de pouvoir monter dessus .La scène se passe sous une petite bruine devant l’aéroport.Je suis exténué par les 35h de voyage et les 12h de décalage horaire. Je monte pas vite mais j’y suis !

Je ne reste pas à Auckland, ce n’est pas la capitale bien que ce soit de très loin la plus grande ville du pays. Il y a un petit centre ville avec un bouquet de gratte-ciel, modeste et moche quand on se place en son centre, mais plutôt élégant lorsque l’on se trouve de l’autre coté de la baie. Immédiatement autour de ce centre, la ville pavillonnaire commence. Plutôt serrés les un contre les autres au début les jardins s’étirent proportionnellement à leur distance du centre. Tant est si bien qu’au bout de 40km les jardins deviennent des petits prés peuplé de moutons.

Je roule un peu plus de deux jours, direction sud-est. Il y à beaucoup de plantation de kiwis ou je devrais pouvoir travailler quelques semaines.

Alors là vous allez me demander naturellement pourquoi à peine arrivé je cherche déjà à travailler au lieu de savourer ces splendides paysages qui m’appellent. Et bien, le coût de la vie en Nouvelle-Zélande est assez prohibitif et je me suis promis de ne pas y dépenser un euros supplémentaire mais uniquement les dollars que je pourrais gagner sur place. J’atterris donc dans un backpacker du village de Katikati ou Parram, le manager originaire du Penjab, comme la quasi totalité des occupants du lieu s’occupe aussi de vous trouver un boulot dans les plantations de kiwis.

Il est très important avant de poursuivre mon récit de comprendre ce que c’est qu’un kiwi en Nouvelle-Zélande.

Kiwi :. Étymologie : du mots maori « Kivi-kivi »

sens 1 : Nom masculin Kiwi est le nom vernaculaire des oiseaux de l’ordre des apteryformes qui ne comportent de cinq espèces toutes endémique de la Nouvelle-Zélande. Les kiwis sont considérés comme des espèces menacées. Les kiwis sont des oiseaux terrestres incapables de voler de la taille d’une poule. Du fait de leur rareté et de leur caractère nocturnes ils sont difficiles à observer dans leur environnement naturel. Le long bec fin très caractéristique des kiwis en a fait l’un des emblèmes de la Nouvelle-Zélande. « j’ai eu la chance de voir un kiwi la nuit dernière, juste à coté de Haast »

Sens 2 : nom commun ou adjectif ; synonyme de Néo-zélandais, sous-entendu parfois néo-zélandais non-maori. Le kiwi oiseau est si bien identifié à la Nouvelle-Zélande que le terme désigne désormais dans le langage commun les habitants du pays « Les kiwis sont piètres cuisiniers mais de très bon mangeurs » ou tout ce qui s’y rapporte quand on l’utilise comme adjectif « le vin kiwi est bien meilleur que ce que l’on pense »

sens 3 : nom masculin. Kiwi est le nom vernaculaire des fruits de plusieurs espèces de lianes du genre Actinidia. Ces fruits originaire du sud est de la Chine sont également appelés « groseilles de Chine » Au début du vingtième siècle des cultivateur néo-zélandais font tout un travail de sélection des plants afin de faire grossir le fruit de la liane et de lui donner après plusieurs décennies d’effort le succès commercial actuel. Le nom s’impose facilement notamment grâce à un fort marketing néo-zélandais. La Nouvelle-Zélande est encore aujourd’hui le second producteur de kiwis au monde. Les néo-zélandais utilisent cependant plus fréquemment l’expression kiwi-fruit pour éviter les confusions avec les différents usage du terme.

Il y a aussi un vieux maori, sosie de Popey

Tout est mal organisé dans ce backpacker, Parram est un jeune homme trop gentil, incapable d’autorité face à ses compatriotes trop dispersés ou trop occupés à la fumette et à la picole. Je sympathise avec Satish, contrairement aux autres il n’est pas un sikh du désert du penjab mais un hindou des plaines l’Andhra Pradesch. Satish comme beaucoup d’autres jeune indiens est entré en Nouvelle-Zélande avec un visa étudiant et comme un certain nombre d’entre eux est resté dans le pays après l’expiration de son visa. La communauté indienne étant assez forte, surtout sur l’île du nord, les gens dans la situation de Satish trouvent encore du travail au noir grâce l’entre-aide communautaire. Satish a un « bon contact » pour un travail dans les plantations de pommes à Hastings 350km plus au sud. Je pourrais travailler légalement et lui au noir. Tout le monde y trouve son compte, notre employeur peut ainsi plus facilement présenter un bilan comptable crédible à l’administration fiscale. En effet en Nouvelle-Zélande toutes les administrations collaborent bien entre elles et l’administration fiscale ne manquera pas de prévenir l’immigration en cas de doutes. Satish prend le bus et moi le vélo malgré sa perplexité sur mon mode de transport favori.

Hastings est situé à 20 km de la côte dans une grande plaine agricole. La ville est dans l’ensemble assez moche. Où que l’on soit on a le sentiment de s’être perdu dans une zone commerciale et industrielle. Le seul modèle architectural qui jalonne ce quadrillage de rue désespérément parallèles et perpendiculaires les unes par rapport aux autres c’est le modèle « hangar » , des grand rectangles de tôle partout. L’axe principale de la ville est pollué par les vapeurs de malbouffe on y trouve sur un petit km de long : KFC, Mac Donald, Domino Subway, Burger King, Pizza Hut, un kebab, deux fish and chips, deux food truck à burger, un supermarché lowcost, des resto chinois, trois « bottle shop » (magasin d’alcool) entre autre … J’ai l’impression de prendre deux kilos a chaque fois que j’y passe.

Non j’ai pas honte d’embêter les poussins pour un jeu de mots très réussi!

Les hastingois sont nombreux à être des immigrés récents, la communauté indienne y est très visible aussi que la communauté tongienne qui aime arborer son drapeau sur les voitures, principalement les soirs de matchs de rugby.

Durant la saison des pommes de nombreux travailleurs du Vanuatu, des Samoas ou encore des îles Salomon bénéficient de visas temporaires de travail et colorent un peu la ville. Cependant j’ai une vision moins angélique que la plupart des gens sur se système de visa saisonnier accordés aux îliens. Les gars (mais aussi les femmes parfois) postulent dans des agences directement au pays. Les agences prennent tout en charge : les formalités de visa pour chacun, le trajet en avion, le travail sur place ainsi que le contrat qui va avec, tout les déplacements en Nouvelle-Zélande, le logement, le transfert des salaires au pays et le trajet retour le sur-lendemain du dernier jour de travail. Chacune de ces opérations justifiant un prélèvement sur le pécule finale de chaque travailleur évidemment. Les agences imposent un règlement très infantilisant à leurs recrues, interdisant à ces gens de boire de l’alcool ou même du kava, en toutes circonstances. A aucun moment ces travailleurs n’auront l’opportunité de changer de logement ou de travail si ceux ci ne leur conviennent pas. Et encore moins l’opportunité de voir autre chose qu’une plantation de pommes. Les différents gouvernement néo-zélandais sont très fiers de ce système qui selon eux est gagnant-gagnant car la Nouvelle-Zélande comble une partie de son déficit de main d’œuvre et les îliens dixit certains kiwis « gagnent eux même leur propre aide humanitaire » pour développer leur pays misérablement vulnérable aux cyclones. Une réflexion d’une arrogance effroyable. Le dernier gros cyclone du Vanuatu, le plus fort n’ayant jamais affecté ce pays a certes causé la mort de plusieurs dizaines de personne mais le chiffre est à mettre en perspective avec la chute de 50% de la population après la découverte du pays par les occidentaux.

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Selon moi, le système de visa saisonnier bien que vertueux à court terme est bien plus vénéneux qu’il ne semble. L’agriculture néo-zélandaise est horriblement polluante, les fermiers utilisent une quantité aberrante de produit chimique parfois de façon complètement stupide. Un exemple : du glyphosate le long des clôtures … déjà que les clôtures ne servent à rien, les pommes n’ayant que très peu d’autonomie spatiale… Ce modèle agricole hyper productiviste, complètement orienté vers l’exportation est en train de détruire l’environnement sanitaire de la Nouvelle-zélande est a besoin d’une grosse remise en cause d’urgence. Si vous mangez des pommes épluchez les sur deux centimètres de profondeur.

De leur côté en prenant l’exemple du Vanuatu que je connais, les mecs travaillent pour financer deux choses principales. Des maisons en ciment et en tôle, deux matériaux très cher à importer et souvent de mauvaise qualité qu’ils devront continuellement réparer tout comme leur maison traditionnelle dont les matériaux sont offerts par la jungle. Les Vanuatais on parfois besoin d’argent pour financer l’éducation des enfants mais de plus en plus ces gens éloignés six mois par an de leur île s’approprient notre modèle de consommation et se procurent toutes sortes de choses dont ils n’ont pas besoin mais qui font envie. Cela ne fait que rajouer un peu plus de fragilité et de dépendance à ces îles en fin de compte.

Je reste à Hastings jusqu’à début janvier le temps d’accumuler mois aussi, couvert de honte et de réalisme, un petit pécule avant de commencer véritablement mon périple au pays des kiwis, des maoris et des autres.

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tutututuuuuuuh!

Je suis donc rentré en France pour savoir si j’étais bien un tuberculeux ou pas. Oui, c’était bien le cas, comme quoi la procédure néo-zélandaise n’est pas si absurde. Pas de panique, de nos jours et surtout quand on n’a pas développé les symptômes ça se soigne très bien. Six mois d’un traitement antibiotique pour cheval et c’est fini. Comme je suis une bête je n’ai eu aucun effet secondaire du traitement à part le fait de faire pipi orange.

Reste la question de où ai-je été contaminé ? Je ne le saurais jamais avec certitude. Les médecins me disaient que j’étais un tuberculeux passif depuis deux ou trois ans, les trains chinois et indiens, les bateaux indonésiens où j’ai été durant de très longues heures voire des jours dans des espaces confinés, surpeuplés de gens souvent très pauvres et sans accès régulier à des services de santé sont des suspects idéaux. La tuberculose se transmet le plus souvent d’un malade qui à développé des symptômes (toux, fièvre, transpiration etc.) par les tout petits postillons qui flottent dans l’air.

Une fois guéri, j’ai refait une demande de visa pour la Nouvelle Zélande. 140 euros. Ça à été un moment très stressant. J’étais à la limite d’âge absolue pour ce type de visa, si je devais recevoir un nouveau refus, il m’aurait été impossible de repostuler. Je dois prouver que je suis bien guéri à l’immigration néo-zélandaise en suivant tant bien que mal la logique de leur administration. Pour commencer, je dois refaire une radio des poumons dans la clinique agrée par leur bon soins, 80 euros. Logiquement j’aurais dû recevoir, deux jours plus tard, un mail demandant les tests supplémentaires. Comme je ne reçois rien je retourne à la clinique m’assurer que la radio a bien été mise en ligne sur le logiciel dédié, on me dit que oui, tout roule, je ne dois pas m’inquiéter. Je reçois enfin un mail de la Nouvelle Zélande, qui dit « Vous n’avez pas fait la radio que nous avons demandée, si dans deux jours on n’a toujours rien votre visa sera refusé » je réponds : « Je pense que votre système montre mon dossier comme étant incomplet car d’autres tests devraient m’être demandés, s’il vous plaît dites moi quels sont ces tests exactement afin je puisse les réaliser. Je vous assure que la radio a déjà été faite. » On me répond a nouveau « Non non non, juste la radio, dépêchez vous il vous reste 24h »

Panique et agacement ! Je fonce à la clinique. « Mais monsieur, c’est en ligne enfin, regardez vous même sur l’écran » « En effet la radio est bien en ligne mais c’est quoi le truc orange là ? » « chaiii pas, on n’y pas accès ici, ils doivent demander d’autres infos » Nann sans déconner… je fonce au cabinet du médecin agréé par l’immigration néo-zélandaise, la secrétaire a accès aux détails de mon dossier contrairement à la clinique. Elle me dit qu’il me faut simplement fournir l’ensemble de mes radios réalisées durant et après le traitement ainsi qu’une lettre du pneumologue qui m’a suivi, en anglais. Je demande trois fois à la secrétaire si le test d’analyse des crachats n’est pas demandé car il faut 8 semaines pour que ce dernier donne des résultats fiables. Elle dit non trois fois.

J’appelle directement les services d’immigration en Nouvelle Zélande. Deux coups de fil qui incluent un total de trois heures d’attente avec la petite musique pénible. 30 euros de facture téléphone en plus, et encore là- dessus je m’en sors bien. En fait je commence à comprendre que deux entités des services d’immigration néo-zélandaise communiquent mal entre eux, le service médical qui statue sur mon état de santé acceptable ou non et l’agent d’immigration avec qui je communique par mail qui prend la décision finale sur mon visa. Miracle, avec mes coups de fil je corrige le bug administratif entre deux services d’un même ministère situés à 20 000km de là où je me trouve. L’agent me donne deux semaines de délai pour envoyer toutes les infos sans faire mentionner qu’elle s’apprêtait injustement à me refuser mon visa.

J’avais déjà numérisé mes radios et demandé à mon pneumologue la fameuse lettre bien en amont. Lettre qu’il ne m’avait jusque là pas envoyée. Je lui balance trois mail où je mets toute la pression possible, la lettre arrive en 24 h. Je paye 75 euros pour la faire traduire en anglais, si j’avais pu le faire moi même c’eût été trop simple. Je prends rendez vous avec la médecin agréée, 75 euros les cinq minutes de consultation, où c’est moi qui explique que je suis guéri !

Je pense être arrivé au bout de l’histoire, j’envoie par mail les radios à la secrétaire qui se chargera de les mettre en ligne sur le logiciel de l’immigration néo-zélandaise. Le lendemain je reçois un mail de sa part qui commence par « I’m very sorry but … » Oui, parce qu’elle me parle en français et m’écrit toujours en anglais. « but, les radios doivent absolument être au format « dicom »  »

C’est quoi ça dicom ? Wikipédia explique que c’est un format informatique utilisé par les logiciels de radiologie. Cool ! J’en ai deux déjà en dicom sur un CD. J’appelle les différents centres radiologique où j’ai fait mes radios. Un seul pourra me fournir ma radio en format dicom. Je suis à trois dicom sur les six radios à fournir. Aucun centre radiologique, pas même la clinique agréée et l’une des seules en France à travailler avec ce système de données médicales en ligne pour services d’immigration, n’accepte de convertir mes radios en dicom. Je dois m’y coller moi même, je télécharge pas moins de cinq logiciels de radiologie sur mon ordinateur et parviens tard dans la nuit à envoyer à la secrétaire des beaux fichiers dicom tout frais.

Un mail : « I’m very sorry but … » « but whaaat ! Je commence à saturer là ! » « but, les fichiers doivent faire moins de 10 mo, et là ils font tous plus de 20 mo » Ben ouais meuf, Wikipédia dit que c’est un format haute définition, donc par nature c’est des gros fichiers et dans leur conception on n’est pas censé pouvoir les réduire. Comme ça les toubibs ils peuvent bien voir toutes nos petites taches tuberculeuses sur nos poumons …

J’avais toujours mes logiciels d’apprenti radiologue, je tâtonne parce que je ne suis pas informaticien et mes dicom rétrécissent enfin. J’ai pris une marge de sécurité, ils font tous moins de 8mo.

Un mail « I’m very very sorry but… » Je perds mon sang froid, je veux pulvériser mon ordinateur sur le mur de l’appartement tellement fort qu’il devrait aussi traverser le mur du voisin de l’autre coté de la rue. Je veux annihiler la planète. « but, what encore bordel de merde ? «but, en fait c’est 5mo max » Avec tout ces contre-temps le délai de deux semaines expire le lendemain. J’envoie à l’agent d’immigration un mail avec une copie de mes échanges avec la secrétaire afin de justifier mon retard. Finalement c’est pas bête de s’écrire en anglais.

Je convertis mes radios en dicom de toutes tailles, en fichier jpeg, en gif en pdf même en doc et je me pointe avec l’ensemble directement au cabinet médical avec ma clef USB que je donne à la secrétaire. « allez y, essayez les tous , il y a bien une version qui va passer ! » « ah oui, c’est bon c’est en ligne ! Ah zut j’avais pas vu il y a un sous-onglet, ils demandent aussi le test d’analyse des crachats » « on parle bien de celui qui prend huit semaines à propos duquel vous m’aviez dit trois fois qu’ils ne le demandaient pas ? » « oui, je suis désolée »

Soupires, lassitude et vide.

La médecin passe dans le hall. « Docteur, qu’est qu’on peut faire ? » Qu’elle demande. « Remettez la lettre du pneumologue à la place des résultats, le dossier aura l’air d’être complet. » « mais…. ouais j’en ai assez de toutes façons… »

Épilogue : Depuis des semaines les mails provenant de la Nouvelle Zélande ne me donnaient que de nouveaux emmerdements bureaucratiques. Et force est de constater que l’informatique n’a rien simplifié du tout. Du coup quand j’ai reçu celui qui m’annonçait que mon visa avait été validé, j’ai grommelé avant de l’ouvrir, un truc comme « qu’est-ce qui veulent encore ces cons ». Puis j’ai arrêté de faire la gueule.

Je repars tout frais, avec un nouveau vélo talentueusement conçu et monté par mon pote Pascal, grand maître manager du magasin cyclable à Poitiers. Je repars aussi avec une remorque remise sur roulette grâce à la gentillesse de Christian son concepteur et fabriquant. Christian est un passionné et un perfectionniste qui mérite bien une petite pub : tzc.fr pour commander des remorques en forme de chauffe-eau ! Merci à tous les deux, vous m’accompagnez au quotidien !

Je suis allé tester le matos dans les Pyrénées

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tremblement au paradis

Tout au bout de Tanna il y a une baie appelée « Port Resolution » très prisée des plaisanciers. Le voilier est évidemment l’un des meilleurs moyens de visiter le pays et j’espère bien trouver quelqu’un qui acceptera de me prendre à bord entre deux îles.

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Il y a justement ce jour là tout un groupe de voiliers qui participent à un « rallye » autour du monde. Il ne s’agit pas d’une course mais simplement d’un groupe de plaisanciers qui voyagent ensemble aidé dans la logistique à chaque escale par une organisation. J’aborde le groupe qui vient juste de toucher terre. Je suis un peu déconcerté. Alors que je viens de passer une semaine au sein de villages vanuatais isolés et incroyablement accueillants , ce monde de rallyes me semble être d’un décalage comique. Le village dispose d’un « yacht club », grâce auquel les organisateurs du rallye ont pu faire venir une importante quantité de bière. Le yacht club change les dollars en vatu, la monnaie locale, vend des cartes sim et organise la visite en 4×4 du volcan. Beaucoup des participants sont très mondains, pas antipathiques, mais clairement bien éloignés de ma façon de vivre et de voyager. Matt, un anglais, navigue depuis Londres sur son voilier. Il est accompagné depuis les Galapagos de Juan, lui même originaire de ces îles d’Amérique centrale. Juan, 25 ans et joyeux comme un latino-américain, m’assure que Matt m’emmènera volontiers sur son bateau jusqu’à Port Villa.

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Avant de partir et à l’initiative des villageois, il est organisé une belle cérémonie d’échange de cadeaux. Le cyclone Pam a ravagé le pays deux ans plus tôt, et comme aux Fidji, le retour à la normale prend des années. Les plaisanciers ont apporté des outils et des clous qui font cruellement défaut ici pour la reconstruction des bâtiments et en échange les femmes du village ont tressé de grands paniers en feuille de palmier que les hommes on rempli à ras bord d’un échantillonnage généreux de fruits et légumes de leurs jardins. Cet échange entre deux groupe tellement différents à été incroyablement bien orchestré par cette population si chaleureuse et accueillante. Les vanuatais ont eu le souci de comprendre la culture de leurs hôtes afin de les associer complètement dans cet acte traditionnel, et cela sans que personne ne ressente à aucun moment cette gêne ou cet embarras qui se produit souvent lorsque deux groupes culturellement éloignés interagissent de façon un peu formelle.

Avec Matt et Juan, je fais à nouveau escale sur Erromango, de l’autre côté de l’île cette fois ci avant de voguer vers à Port Villa en quelques jours de mer. Matt est un homme très généreux, peut être même trop, il ne me demandera aucune participation, même pas pour la nourriture. Par contre il est d’un caractère très irascible, ce qui sur un petit voilier est une difficulté. Il s’emporte souvent quand je le fais répéter. C’est qu’il parle avec un certain accent mais surtout que sa voix à été grandement diminuée par un cancer de la gorge. Ce tour du monde à la voile qu’il réalise, c’est sa rémission, sa victoire sur la maladie. Juan qui le fréquente depuis un moment maintenant, loue ces qualités de battant, sa générosité et sa droiture mais est excédé par ces pulsions névrotiques, souvent difficile à remettre en cause quand sur un bateau le capitaine est seul maître à bord. « Il à déjà perdu plusieurs équipiers et je vais pas le suivre jusqu’au bout » dit-il non sans regrets. Pour ma part j’étais content de cette premier expérience sur un voilier en haute mer, même si c’est vrai, j’aurais aimé que Matt puisse me transmette un peu plus de savoir qu’il ne l’a fait sur la navigation.

A Port Villa, comme lors de mon premier passage, il y à un gros paquebot de croisière à quai. Je ne reste pas plus longtemps en ville. Je part sur l’île d’Epi,100 km au nord. Je prends l’avion, et c’est un peu inhabituel. On commence par me peser, pas mes bagages, enfin si les bagages aussi mais séparément de moi-même. C’est que mon avion n’a que dix places et qu’il faut équilibrer le poids des passagers dans l’habitacle. Nous sommes cinq sur ce vol bihebdomadaire ce jour là. Un couple de touristes australien, deux vieux fermiers locaux qui gardent leur machette entre les genoux durant vol et moi. L’aéroport de Laman bay principal village d’Epi est composé d’une piste herbeuse, qui sert parfois de pâturage, et un bâtiment en brique sans électricité. Le copilote décharge les bagages en les propulsant a l’extérieur de l’avion à coup de pied. On avait été prévenu par une petite pancarte avant le départ : « Le rôle de votre valise est de protéger vos affaires, ne soyez pas outrés. ».

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La « route » principale d’Epi

Je suis abordé par un homme d’une soixantaine année, du type nounours géant avec une belle barbe blanche et massive. Il est est plein de sympathie et de gentillesse, il me fait spontanément un petit topo sur l’île et m’indique les noms de toute une liste de gens qui pourraient m’héberger autour de l’île. Puis il me parle de ses enfants tous de jeunes adultes. « j’ai trois fils… j’ai deux fils et une fille » « Mon fils est mort. Il est mort juste là, le mois dernier » dit il en pointant l’angle de l’allée qui mène à sa maison « Il avait 29 ans, une crise cardiaque … » Le chagrin de ce père m’a ému, il s’est confié à moi, un inconnu, sans cacher sa douleur, en contenant l’émotion dans sa voix tout en me communiquant le besoin qu’il l’anime d’aimer les autres et d’aimer la vie.

Car au delà des drames personnels et universels, le Vanuatu est un pays heureux. Tellement heureux qu’il a été désigné « pays le plus heureux du monde » en 2006. Je ne sais pas comment sont réalisés ces classement, ni même s’ils ont un sens mais je veux bien expliquer pourquoi on est heureux au Vanuatu. Bien sûr le climat tropical, les plages magnifiques, bref le cadre de vie aide. Au Vanuatu on travaille très peu, deux ou trois heures par jour à peine dans les jardins. Le sol enrichi par les volcans et la jungle sont hyper fertiles, le manioc, le dalo, les patates douces et autre légumes poussent a toute vitesse. Les poules sont assez autonomes également, elle se nourrissent seules bien souvent, picorant allègrement les insectes de la jungle. Parfois la fin des repas des humains leur est donnée si les chiens leur laisse une chance. Les cochons sont sauvages mais la chasse est toujours un sport apprécié. La pêche se fait souvent à marée basse dans les lagons, les plus sportifs feront de la plongée pour capturer les proies, mais nul besoin de se rendre au delà de la barrière de corail où la mer est déchaînée. Les maisons sont construites avec les matériaux offerts par la jungle. Le Vanuatu est donc l’un des rares pays où l’on peut vivre sereinement sans argent, en occupant le plus clair de son temps aux loisirs telle la consommation de kava. D’ailleurs, il est incroyable de constater que la plupart des jeunes, même après avoir fait des études à l’université de Port Villa, reviennent très souvent dans leur village pour y vivre. Le village est l’élément structurant le plus important du pays, tout le monde porte au cœur de son identité son village. A tel point que l’on m’a abordé plusieurs fois par la question suivante « Où est ton village ? » L’émigration et l’immigration sont anecdotiques. L’éducation et la santé pourraient certes être perfectionnées, les moyens de l’état sont faibles mais les infrastructures existent. Une île comme Epi de 5 000 ou 6 000 habitants disposent d’école dans chaque village, et d’un collège-lycée avec un internat à Laman Bay. Laman Bay dispose d’un grand dispensaire et la plupart des villages de petites infirmeries.

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Un grand nakamal, l’un des rares à avoir résisté au cyclone Pam.

Je me lance dans un tour complet de l’île, le centre n’est pas ou très peu habité. Le littoral est toujours la zone de prédilection d’installation des villages, si possible en face d’une grande baie. Mais quand la population d’un village atteint 300 ou 400 habitant certaines familles s’installent un peu plus loin et fondent un nouveau village sur un territoire offert par le chef du village ou sur un territoire vierge. Le chef de famille devient ainsi lui aussi chef de village. La fonction de chef est héréditaire mais pas toujours de père en fils, il y à un age minimum et il est fréquent que la transmission se fasse de frère à frère.

La moitié ouest du contour de l’île dispose d’une piste utilisée par la dizaine de véhicules disponible sur toute l’île. Il me semble que cette piste bénéficie au développement démographique des villages qu’elle relie. Chef Maurice qui m’hérberge une nuit, est tout de même le responsable d’un patelin de 500 âmes. Les langues locales en revanche pâtissent de cette autoroute. Le contact entre villages étant facilité l’usage du bichelamar progressivement prend le dessus même au sein d’individu du même groupe linguistique.

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Pêche à pied face à l’île-volcan Lopevi

Les habitants subviennent spontanément à tous mes besoins, je me fais offrir des fruits en début d’après midi par les groupes qui reviennent des jardin, certains m’accompagnent dans ma marche sur plusieurs km afin que je prenne le bon sentier où simplement pour me tenir compagnie. Quand je demande à n’importe qui où je peux dormir, je sais que je dormirais chez lui.

Il y a un village d’Epi qui n’est pas peuplé d’habitant originaires de l’île mais d’une petite île volcan voisine. Le volcan de Lopevi, belle bête de 1400m de haut, est entré en éruption il y a plus de 30 ans et a contraint la population à fuir les lieu. Les terres que ces gens occupent dans leur nouveau village leur sont prêtées par les chefs d’Epi. En revanche ils sont toujours les propriétaires de leur île sur laquelle ils se rendent encore quotidiennement en barque pour cultiver leur jardin. Le volcan semble s’être calmé depuis un moment et certaines familles commencent tout juste à se réinstaller sur place.

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Passé ce village je dois traverser une longue section de jungle sans habitat. On m’assure qu’il n’y a qu’un seul sentier et que je ne vais pas me perdre. En réalité ce fut un vrai labyrinthe surtout au début. Il y avait des tas d’embranchements menant vers des jardins. Comme il était souvent impossible de les différencier du bon sentier, je choisissais une direction au hasard en prenant bien soin d’enregistrer ma position GPS sur mon téléphone. Il n’existe pas de véritable carte d’Epi, mais simplement le contour de l’île avec une dizaine de points identifiés comme les sommets des trois volcans (éteints?). Je ne négligeais pas non plus la fameuse méthode dite du « petit poucet » en dessinant des formes reconnaissables à l’aide de bâtons trouver autour de moi. Méthodiquement je progresse sur le sentier, rebroussant chemin parfois sur plusieurs km. A mi chemin je croise un type qui cette fois ci me jure qu’il n’y a plus d’intersection. En effet le sentier, très étroit, me guide convenablement au fond d’une jungle épaisse, loin des falaises de la cote voisine. Une jungle sans fin, sur une toute petite île. C’est intimidant et rassurant à fois. Je prend en altitude, je grimpe à 500 m au dessus de l’océan jusqu’à un panorama grandiose sur la pointe sud-est de l’île. J’aperçois les lagons et lac au milieux desquels se trouve un petit groupe de village complètement séparé du reste de l’île. Au large, je vois toujours Lopevi et au moins quatre autre îles, dont une inhabitée tout à fait stéréotypé eavec sa plage de sable blanc, son petit lagon, sa petite montagne ronde et ses quelquee cocotiers. Mais donnez lui son Robinson la pauvre !

Sur la cote sud le seul chemin c’est la plage. On peut choisir de traverser les anciennes plantations de noix de coco, mais c’est à vos risques et périls. Un cocotier produit et donc laisse tomber environ 200 noix de coco par an tout au long de l’année. En passant sous des milliers d’arbres, on multiplie le risque d’une mort très conne.

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De retour à Laman Bay, je croise un Espagnol qui marche comme moi autour des îles. Alors que nous dînons dans le seul resto existant les murs se mettent à vibrer , faisant claquer les objet qui y sont accrochés, le sol tremble aussi et même gronde. Le tremblement de terre dure une dizaines de secondes, nous nous regardons encore d’un air stupéfait quand notre aubergiste déboule dans la salle le sourire jusqu’au oreilles. « Vous avez senti ça ? C’était génial non ? » Pour nous c’était la première fois, pour lui c’est presque banal, au Vanuatu il y a un séisme par jour en moyenne.

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